Fraise VS Vanille (PV Anakara)

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Seize heures. Les élèves de Shibusen sortirent de l'école.

Apparemment, et bien que l'été ait officiellement laissé la place à l'automne, le soleil avait décidé que cette journée serait sa journée. Il faisait si chaud qu'on se serait cru dans un four. Tout le monde, ou presque, transpirait à grosses gouttes. Même Iwi, que la chaleur ne gênait habituellement pas davantage que le froid, avait la bouche pâteuse. Alors pourquoi gardait-il obstinément sa veste posée sur ses épaules, pourrait-on se demander ? Mis à part le fait qu'il était cinglé ? Qui pourrait le dire ? Les habitudes sont tenaces. À vrai dire, il ne pensait pas à grand-chose. Il marchait comme un zombie dans les rues inondées de lumière, le regard vide, mains dans les poches, casque sur les oreilles. La musique qui en sortait lui était si familière qu'il ne l'entendait même plus.

Un cornet de glace.

Il s'immobilisa. Revenant à moitié au monde réel, il jaugea longuement l'établissement devant lequel, dans un état second, il venait de s'arrêter. Ce n'était pas son bon vieux appartement trop bon marché mais un café tout aussi cheap qu'il connaissait bien. Ou, plus exactement, dont le gérant le connaissait bien. Il était bon client, alors ce type ne le chassait pas, il n'aurait pas su se payer ce luxe, mais l'envie ne lui manquait guère. C'était un homme de grande taille, corpulent, les yeux noirs, les bras comme des jambons, de gros sourcils noirs, une barbe noire, il ressemblait à un ogre et avait renoncé depuis longtemps à se faire appeler autrement par Iwi que "Barbe Noire".

- Barbe Noire, mon ami !

- Hmphh...

Il était en train d'essuyer une vieille chope avec un chiffon probablement plus vieux encore. Il le fusilla du regard et se remit à sa besogne avec une hargne nouvelle qu'elle ne méritait pas. Tout sourires, Iwi vint s'accouder au comptoir et lui tapa familièrement l'épaule.

- Comment va, dis ? Les affaires tournent ? Tu sais que je suis ravi de te voir en pleine forme ! Mais vindiou, qu'est-ce que ça tape, dehors ! Comme ça ! - il lui tapa l'épaule plus fort - et même encore plus ! - il le tapa à plusieurs reprises et le gérant fit un pas de côté pour l'éviter.

- Passe ta commande, qu'on en finisse, grommela-t-il.

- OK ! Alors, mon rêve, ce serait un cornet de glace à la fraise. Oui, quand ça tape fort comme ça - faute de pouvoir taper le propriétaire, il tapa le comptoir - je renonce à la virilité. Je redeviens l'enfant naïf, pur et innocent que j'étais jadis. Je ne sais pas si tu as remarqué que je ne le suis plus vraiment, la plupart du temps ? C'est que j'ai mal tourné ! Haahahaa t'as compris ? J'ai mal tourné mais les affaires tournent ! Hahahahaha !

Bref, il continua à tourmenter le gérant quelques longues et interminables minutes qu'il serait trop fastidieux de relater avec précision. Tous les clients s'éloignèrent de lui le plus possible. Il allait enfin commencer à déguster sa glace quand il se fit la réflexion qu'il faisait vraiment étouffant dans le café. Il examina un instant son cornet d'un air dubitatif.

- Tu n'as pas la clim', Barbichette ? s'émut-il. Écoute, je sais que tu vas être triste mais je crois que je vais me faire cette glace dehors, à l'air libre. Tu sais ? là où il y a de l'oxygène... Soyons braves et disons-nous adieu !

- Barre-toi !

Une minute plus tard, il était posté à l'entrée du café.

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Anakara était fatigué par ses missions, il en avait déjà fait deux cette semaine. C'était enfin le week-end ! On avait beau être en automne, le soleil tapait fort, si fort que la température au soleil avoisinait les trente degrés, ce qui est plutôt rare à Death City. Pour lutter contre la chaleur, Anakara décida de se payer une glace, mais pas un sorbet pour les petits enfants, une véritable glace à l'italienne, parfum vanille.

Le jeune homme se dirigea donc vers le bar de la ville, "Chez Barbe-Noire". Un habitué était posté à l'entrée, comme un garde royal de Birmingham Palace. Il mangeait une glace à la fraise, l'air contrarié. Anakara entra dans l'établissement. À l'intérieur, il faisait encore plus chaud que dehors, le Yokaï se dirigea vers le comptoir, derrière lequel il aperçut un homme barbu, transpirant abondamment. Il lui dit :

-Une glace à l'italienne, s'il vous plaît.
-Bien sûr, quel parfum ?
-Vanille.
-Bien, voilà pour vous ! Ça vous fera 2 dollars.
-Tenez, merci, et au revoir !
-À bientôt, fiston !

Anakara dégustait sa glace tout en sortant du bar, une fois dehors, il se dit :

-Ah ! Sympa cet endroit, les glaces à l'italienne sont bien meilleures que leurs sorbets à la fraise, ici ! Bon, d'accord il fait un peu chaud, mais le patron est cool !

Il se rendit compte qu'il avait fait profiter son avis à toute la terrasse...

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Iwi était mécontent. Il faisait si chaud que la glace devenait liquide. Elle gouttait de partout et le sol en avalait davantage que lui-même. C'était un crime car elle était exquise. Il décida de se lancer dans un duel contre le sol. Il jeta un regard noir à ce dernier et se mit à dévorer sa glace avec un acharnement implacable, se mettant de la fraise partout. Vaincre ce ridicule bout de trottoir n'était rien de moins qu'une question d'honneur.

*Elle est à MOIIIII !*

Absorbé dans son combat, il vit à peine le gars aux cheveux bleutés passer à côté de lui. Il finit d'avaler la boule réfrigérante et lécha le cornet avant d'engloutir ce dernier en deux bouchées exactement. Il termina la course les joues et le nez barbouillés de fraise et de miettes de cornet, mais il était très content. Il sourit béatement à un couple de vieillards sur le trottoir d'en face qui le regardaient bizarrement. Bon, votre imagination se débrouillera probablement mieux pour vous décrire l'air considérablement idiot qu'il arborait à ce moment-là que tous les mots que nous pourrions aligner. Il se léchait les babines comme un renard quand l'horreur, l'ignominie, l'affreuse déclaration de guerre fourbe et vile parvint à ses oreilles.

- Ah ! Sympa cet endroit, les glaces à l'italienne sont bien meilleures que leurs sorbets à la fraise, ici ! Bon, d'accord il fait un peu chaud, mais le patron est cool !

Subitement, Iwi devint grave.

Gravement, donc, si tant est qu'on puisse faire quoi que ce soit gravement avec de la glace à la fraise partout sur le visage, il tourna lentement la tête vers le haïssable menteur qui venait de parler. Quant à sa remarque sur le patron, elle l'indifférait. Il était même d'accord : il aimait bien ce brave Barbie. Et cela dit sans aucune ironie. Il le comptait parmi ses amis, même s'il n'y avait aucune réciproque. Peu de ceux qu'il considérait comme ses "amis" l'appréciaient, d'ailleurs, ce dont il était conscient et se fichait éperdument ! Les voir sortir de leurs gonds l'amusait au plus haut point et il passait son temps à les tourner en bourrique. En revanche, cette remarque sur les glaces, c'était différent, très différent... Car non, les glaces à l'italienne n'étaient pas meilleures que les sorbets à la fraise. Les yeux d'Iwi s'étrécirent comme ceux d'un faucon. Il le savait, c'étaient les sorbets à la fraise les meilleurs. Cet individu devait être remis à sa place, séance tenante.

Puis, changeant à nouveau d'humeur, il lui adressa un grand sourire et s'exprima de façon exubérante, avec comme un rire contenu dans la voix, ponctuant ses propos de gestes appuyés.

- Hé là, mon grand, je crois que tu as des difficultés avec la grammaire française, non ? Une phrase, c'est sujet, verbe, complément. Quand tu veux dire que les sorbets à la fraise sont meilleurs que les glaces à l'italienne du bar de Barbo, tu places "les sorbets à la fraise" en premier dans la phrase, avant le verbe, et "les glaces à l'italienne" après. Tu comprends ?

Il se figea dans sa tirade, penché en avant, sourire aux lèvres, le regard fixé sur Anakara, une petite lueur démentielle au fond des yeux. *Excuse-toi, vieux, qu'on n'en parle plus !*

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Anakara sortait du bar, il va avait vu un jeune homme à l'air abruti qui restait fixe lorsqu'il était entré. En sortant, le jeune homme semblait agité et parlait au sol, comme si il allait lui voler sa glace.

*En voilà encore un qui a bien l'air abruti, ils sont tous comme ça, ici ?*

D'un coup, celui qui semblait être un fou réagit à ce que Anakara avait dit auparavant :

- Hé là, mon grand, je crois que tu as des difficultés avec la grammaire française, non ? Une phrase, c'est sujet, verbe, complément. Quand tu veux dire que les sorbets à la fraise sont meilleurs que les glaces à l'italienne du bar de Barbo, tu places "les sorbets à la fraise" en premier dans la phrase, avant le verbe, et "les glaces à l'italienne" après. Tu comprends ?
-Non, je trouve bel et bien que les glaces à l'italienne sont meilleures que ces minables sorbets à la fraise pour les gosses ! Non mais de quoi tu te mêles en plus ? Je sais très bien formuler mes phrases ! Je participe même à un forum RPG sur Internet, qui parle d'un manga, Soul Eater, que ça s'appelle !

Mais le jeune homme ne semblait pas plaisanter, il était extrêmement sérieux, ce qui était ridicule, Anakara avait simplement exprimé son avis en public, et il se faisait agresser par un fou qui parlait au sol.

*Non mais quel abruti...*

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- Non, je trouve bel et bien que les glaces à l'italienne sont meilleures...

Le sourire d'Iwi s'évanouit.

- ... que ces minables sorbets à la fraise pour les gosses !

Il n'était pas en colère - c'était un sentiment qu'il éprouvait fort rarement - ni vexé ou irrité d'aucune façon, plus exactement, il éprouvait pour Anakara une sorte de pitié amusée. Il sourit à nouveau en essuyant très dignement les traces de glace sur son visage avec le dos de sa main, écoutant à peine la fin de la tirade, le mec ayant perdu toute la considération qu'il pouvait lui porter dès l'instant où il avait réitéré sa bêtise. Quant à lui, il savait qu'il n'était pas un gosse. Il avait bien des défauts, mais la puérilité n'en faisait pas partie... quoique... hemmm... c'est vrai que la seule raison pour laquelle il s'était fait faire tous ces tatouages était qu'il voulait faire une blague à son supérieur... et puis, il y avait eu cette fois où il avait fait un croche-pied à une petite fille qui portait plein de pommes dans ses bras juste pour pouvoir crier : "et bam, dans les pommes !"... ou encore...

Bon, d'accord, il était peut-être UN PEU puéril. Quoique... Il se posa la question. Notez que toutes ces réflexions se passaient très vite, en quelques secondes à peine, mais les limites du langage nous contraignent à retranscrire ceci en donnant l'illusion qu'un certain temps s'écoule. Ceci dit, son cerveau allait toujours très vite.

- T'as un sérieux problème avec les papilles gustatives alors, fit-il remarquer en haussant les sourcils et en terminant de se débarbouiller, parce que les glaces à l'italienne de Barbie valent rien du touuut !

Il éclata d'un rire railleur.

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Le jeune homme commençait à énerver Anakara. C'est vrai, c'était vraiment puéril, alors qu'il semblait être âgé d'au moins 17 ans.

*Non mais quel gamin...*

C'était trop pour le Yokaï, préférer les sorbets à la fraise aux glaces italiennes le mettait hors de lui. Il sortit ses lames secrètes, à l'aide de ses deux anneaux placés sur les auriculaires. Il s'avança, d'un pas rapide et déterminé, vers le garçon aux tatouages étranges. Il sauta, et effectua un salto avant particulièrement réussi. Anakara se retrouva derrière lui.

-Tu n'es qu'un gamin, tu n'apprécies pas les choses à leur juste valeur ! Les sorbets à la fraise, ça craint, alors j'attends de voir ton style de combat s'il est aussi nase que tes goûts ! Mode animal, panthère des neiges, activation !

Une aura blanchâtre se concentra sur le Yokaï, c'était d'ailleurs la première fois que sa transformation s'effectuait ainsi, peut-être qu'il était devenu plus fort, ou plus mature.

*Suis-je plus fort qu'avant ?!*

À présent, la silhouette du jeune homme s'était mise à quatre pattes, une queue avait poussé dans son dos. Le halo blanc se dissipa dans une explosion de lumière, accompagnée d'un rugissement féroce.

-Allons-y !

Anakara, dans sa forme sauvage, se rua sur le tatoué, sauta et donna un coup de patte plutôt bien maîtrisé et puissant...

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Iwi se déconnecta temporairement de la scène. Typique. Il oublia les glaces et ce type aux yeux rouges pour réfléchir à la grande question : était-il puéril ? Il cessa de rire pour prendre une mine songeuse. Pourtant, quelle que serait la réponse, il n'avait certainement pas l'intention de changer. Il s'était toujours assumé, après tout... Bien. Un mec puéril était un mec qui se comportait comme un gamin. Ça, c'était de la sémantique. Un gamin se comporte de manière irresponsable et irréfléchie, dans le seul but de satisfaire ses propres envies. Un gamin n'est pas innocent, contrairement à ce que prétend le bon sens populaire : il est souvent égocentrique et parfois même cruel. Il arrache les ailes aux mouches et se moque des plus faibles que lui. Il ment à la maîtresse et triche aux jeux. Il vole des cookies dans le placard, bien qu'il sache qu'il n'en a pas le droit, et use de son empathie d'enfant pour manipuler les adultes responsables de lui. Un gamin peut être un monstre horrible. Iwi était-il ainsi ? Il étudia avec lucidité son propre cas. C'est vrai qu'il lui était arrivé d'être irresponsable. Irréfléchi... parfois aussi. Il commettait des bourdes et se fourrait dans des situations inextricables. Mais parfois, il réfléchissait si bien à ce qu'il faisait qu'il manipulait tout son entourage pour obtenir ce qu'il voulait, et il réussissait. Pendant qu'il philosophait, le mec en face de lui s'était échauffé. Il avait effectué un salto avant pour se placer derrière lui et lui criaillait quelque chose, mais Iwi resta parfaitement immobile et indifférent. Il avait cessé de suivre.

- Mode animal, panthère des neiges, activation !

Un rugissement retentit et le troubla faiblement dans sa transe. Iwi releva un peu la tête, les yeux vides. Il se demandait s'il était cruel. Les gens le trouvaient souvent cruel. Pourtant, il n'avait jamais porté la main sur un innocent. Le pire qu'il ait jamais fait, c'était de plaisanter sur leurs misères. Était-ce cruel ? Il n'eut pas le loisir d'y penser. Un mouvement dans son dos l'avait fait revenir au réel. Aussitôt, sans réfléchir, il mit en place l'Encrure. De très minces fils de longueur d'onde s'établirent entre ses tatouages. Une patte s'abattit sur son épaule mais pour atténuer l'impact, il bondit en avant. Il avait agi par simple réflexe et ne put éviter d'être griffé. Le sang se mit à couler dans son dos. L'inconnu avait-il touché un fil ? Il n'en savait rien. Il ajourna la question de la puérilité et se retourna. Son adversaire était un Yokaï. Il s'était transformé en panthère.

- Très impressionnant, dit-il d'un ton absent. Mais tu ferais mieux de retourner à la vie sauvage si tu n'es même pas capable d'apprécier un sorbet à la fraise.

Il soupira et marmonna "Balayage" en s'approchant d'Anakara, comme si tout ça l'ennuyait profondément. Et pourtant, il était assez mal barré, car il n'était pas armé et à part sa longueur d'onde, il n'aurait que ses mains et ses pieds contre les crocs et les griffes de la bête. Pourtant, même maintenant, il n'arrivait pas à se passionner pour les événements. Le petit cercle de longueur d'onde apparut autour de son corps en crépitant. Dans quelques secondes, il s'élargirait brusquement jusqu'à atteindre un diamètre de deux mètres, et l'ennemi aurait tout intérêt à ne pas se faire faucher.

*Il fait trop chaud pour se battre...*

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Anakara avait réussi à toucher son adversaire, et plutôt bien. Malheureusement, ce dernier avait déclenché une technique spéciale juste avant de rentrer en contact avec le Yokaï. Apparemment, elle libérait des décharges électriques assez puissantes. Cette fois-ci, ça avait marché, l'amateur de glaces à l'italienne en avait fait les frais, il ressentit un coup de jus au bout de ses griffes.

*Ah, le salaud, il m'a touché, je vais devoir me débrouiller pour ne pas le toucher directement, ou alors lui donner à chaque fois une bonne patate dans la tronche... Mais j'ai peur que la douleur grandisse au fur et à mesure...*

Plongé dans ses pensées, Anakara ne faisait plus attention à son adversaire, heureusement pour lui, un crépitement l'avait sorti de sa réflexion.

*C'est quoi ça, encore ?!*

Il avait cru entendre son rival prononcer faiblement "Balayage", était-ce encore une technique douteuse de ces Meisters ? Sans doute. Le Yokaï aperçut un flash bleu, comme une vague de longueur d'âme, et fut projeté quelques mètres plus loin, et arrêté par un arbre qui décorait la place. Il se releva, et s'essuya les lèvres qui saignaient superficiellement.

*Arh, je dois arrêter de réfléchir, ça me joue des tours, je vais essayer de l'immobiliser et de lui enchaîner des gros coups...*

Anakara décida donc de foncer à nouveau dans le tas, il sauta sur son adversaire et le plaqua au sol, les deux pattes sur son ventre. Les deux rivaux se regardaient dans les yeux.

-Dommage, mais tu es à moi...

Le Yokaï reprit forme humaine, tira sur les anneaux de ses lames secrètes qui se déployèrent dans le corps du Meister. À ce moment précis, la panthère, ou plutôt le jeune homme, à présent, ressentit une décharge intense, c'était sans doute à cause du fer qui constituait ses armes furtives. Ses yeux voyaient blanc, ses oreilles n'entendaient plus. C'était le noir total, il s'effondra sur son ennemi...

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Le Balayage frappa de plein fouet la panthère qui voltigea quelques mètres en arrière, jusqu'à s'arrêter contre un arbre. Iwi s'immobilisa et la regarda se remettre sur ses pattes. Il sentit indifféremment son énergie refluer d'un coup, prix de son attaque. Il aurait dû être en train de réfléchir à une stratégie ou à un plan quelconque particulièrement fin pour vaincre son Yokaï d'ennemi mais sa tête n'était pas au combat - le manquement le plus grossier qu'on puisse imaginer, typiquement le genre de choses que, même après tous ces combats qu'il avait pu rendre, il commettait encore bêtement. La seule chose sur laquelle s'attardait son esprit dérangé, plus que sa blessure dans le dos, c'était la chaleur, qui lui donnait l'impression qu'on lui frappait les tempes au marteau. Oui, le soleil frappait bien aujourd'hui, c'était clair. Ça faisait bien longtemps qu'il n'avait pas autant souffert de la température. Il en avait cessé de penser en phrases articulées. Et de toute manière, attentif ou non, il aurait bien péniblement échappé à l'animal qui sauta prestement sur lui la seconde d'après. Ses pattes lui broyèrent le ventre. Outch. Il était sacrément lourd. Des petits cailloux s'incrustèrent dans le dos d'Iwi. Il plongea un regard vide, à peine surpris, dans les yeux de son adversaire.

- Dommage, mais tu es à moi...

*Tiens, je suis en mauvaise posture* remarqua-t-il pour lui-même. *Pourquoi je me bats avec lui, déjà ?*

L'animal avait cédé sa place à l'homme et le poids sur sa poitrine s'allégea considérablement. Et là, plusieurs choses se passèrent en même temps. Iwi, qui continuait à le regarder fixement, sentit soudain des pièces de métal plonger dans son torse, apportant avec elles la douleur. Mais au lieu de s'enfoncer complètement et de le tuer, les lames touchèrent les fils. Le fer conduisit la longueur d'onde jusqu'à Anakara dont les yeux se révulsèrent. Il s'effondra sur lui, évanoui. Les armes au bout de ses mains, dans le mouvement, se retournèrent dans la chair d'Iwi. Le sang gicla. Ça aurait été plus drôle s'ils avaient porté des pommes, eut-il le temps de penser juste avant de tomber dans les pommes.

Quand il se réveilla, il n'avait aucune idée de l'heure qu'il était. Il repoussa son ennemi sans vérifier s'il était éveillé ou non et s'assit péniblement en demi-tailleur, la main sur ses blessures. Il avait perdu un paquet de sang et tremblait légèrement. Son épaule le brûlait. Il resta silencieux un moment, puis un sourire lui vint lentement aux lèvres et finalement il se mit à rire. Il s'arrêta vite parce que ça lui faisait un mal de chien.

- Il va me falloir plus d'un sorbet pour me remonter, conclut-il ironiquement.

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Anakara était dans un piteux état, il avait été électrocuté par la technique de son adversaire, contre lequel il voulait se battre à cause d'une stupide histoire de glaces. C'est à ce moment qu'il se rendit compte que c'était complètement puéril. Il devait s'excuser auprès d'Iwi, il n'y était pas allé de main morte avec lui, il lui avait transpercé de ventre avec ses lames secrètes. Mais bon, le meister l'avait tout de même mis part terre, c'était à lui de s'excuser, non mais...

*Oh, et puis zut ! C'est pas à moi de lui demander pardon, hein !*

Dans sa colère, il ne s'aperçut pas de suite qu'il était blessé. En effet, l'électricité magique de son ennemi lui avait cassé le poignet droit. Il ne s'en rendit compte qu'une fois qu'il essaya de se lever, action qu'il abandonna immédiatement, il était trop faible. Il s'allongea au sol, et tenta d'oublier la douleur.

*P*****, il m'a pas raté, ce sale chien !*

À ces pensées, le Yokaï sentit un liquide remonter dans son œsophage. Sa gorge était en feu.

*Qu'est-ce qu'il se passe ? Aaaarrgh !*

Anakara essayait de se calmer, il se disait sans cesse "Chut, calme-toi...", mais cela ne suffisait pas, il vomit abondamment sur la main d'une personne. C'est au moment où il voulut s'excuser qu'il se rendit compte que ce n'était pas du vomi, le liquide était rouge foncé...

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Iwi leva les yeux et le soleil l'aveugla. Il les referma en secouant la tête, pas vraiment pressé de se soigner. Maintenant que le combat était fini, il savourait la tranquillité retrouvée. Mais très vite, il s'en lassa. Il n'aimait pas le calme, en fait. Il songea à ses disques dans ses poches. Machinalement, il plongea la main à l'intérieur de sa veste et en tira un au hasard, l'inséra amoureusement dans son baladeur, positionna son casque sur ses oreilles. Comme d'habitude, la musique étrange et barbare sortit plein pot de l'appareil. Quiconque passait à côté de lui ne pouvait manquer d'en entendre, bien malgré lui, un minuscule échantillon.

*C'était puéril, l'histoire des glaces ?*

Revoilà la grande question. Il se remit à réfléchir. Oui, ça l'était sans doute mais l'autre énergumène lui avait quand même sauté dessus le premier, alors bon, on ne pouvait pas s'attendre à ce qu'il se laisse faire sans se défendre, non ? Et puis, aimer les glaces à l'italienne de Barbo, franchement !

*OK, je suis un vrai gamin* admit-il. *Mais c'est comme ça que la vie est drôle !*

Rayonnant, il se mit à tapoter le sol de ses doigts au rythme de la musique. Il avait les yeux mi-clos, la respiration haletante, le cœur battant à tout rompre et sa peau devenait plus blême de seconde en seconde. Cela faisait peut-être des heures qu'il perdait du sang. Pourtant, au lieu de se lever et d'aller chercher du secours, cet imbécile continuait d'écouter de la musique, au risque de s'évanouir à nouveau. Et c'est sans doute ce qui serait arrivé si un événement ne l'avait tiré de sa rêverie : un liquide chaud tomba sur sa main gauche. Il la leva vers lui mais en contre-jour, c'était difficile de voir ce que c'était. Il la renifla, constata qu'il s'agissait de sang et nivela son regard au niveau de celui du Yokaï qui venait de retrouver ses esprits. Et de lui vomir dessus.

- Bouh, salua-t-il.

Son rival en glaces ne paraissait pas franchement en meilleur état que lui. Iwi prit une décision. Il sourit.

- Eh ben, je déclare le match nul. Tu ne m'en veux pas, j'espère. J'appelle le vétérinaire ?

Tout en parlant, il retirait son casque et éteignait sa simili-musique. Même s'il se moquait un peu, il était réellement prêt à chercher des secours. Finalement, il appréciait assez ce type. S'il fallait bien reconnaître un truc à Iwi, c'est que puéril ou pas, il n'était pas rancunier pour un sou.

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Anakara constata qu'il avait vomit sur la main de son rival. Et du sang, en plus. Il s'assit à ses côtés, le meister dérangé écoutait de la musique étrange et barbare. Beaucoup de gens auraient craché sur ce genre de chansons, pourtant, bizarrement, le Yokaï appréciait ces sons violents. Il regarda la pochette du CD, qui était posée à même le sol.

*Hmm, faudra que je l'achète, tiens...*

C'est à ce même moment qu'il entendit :

-Bouh !

C'était son rival en glaces qui le saluait. Anakara répondit faiblement :

-Salut.

Le meister semblait réfléchir, ce qui semblait être rare chez lui. C'est d'un coup qu'il sortit :

- Eh ben, je déclare le match nul. Tu ne m'en veux pas, j'espère. J'appelle le vétérinaire ?

Le Yokaï hocha la tête et lui tendit sa main en guise de pardon. Un bonheur l'envahit, il s'était trouvé un nouvel ami, le temps était toujours aussi radieux, le soleil affichait un sourire éclatant, et il avait progressé.

*Je crois que l'aventure vient juste de commencer !*

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Le Yokaï lui tendit la main, ce qui le ravit. Il vit que son ex-adversaire semblait aussi content, quoique sans doute pas de la même manière. Iwi la serra avec la main qui n'était pas couverte de sang, mais au bout de laquelle son épaule blessée continuait à l'élancer. Il eut mal et le dissimula par un sourire qui lui dévoilait les dents. Il soutint son regard deux secondes, rangea ses "ustensiles de musique" comme il les appelait parfois et se leva laborieusement. Un voile noir couvrit momentanément ses yeux. Il se rattrapa de justesse à une table de terrasse. Il réalisait maintenant à quel point il était affaibli. Baissant les yeux, il vit que son T-shirt et sa veste étaient pleins de sang. Il cracha un petit caillot rouge sombre par terre et scanna rapidement la terrasse. Elle était déserte. Son œil tomba par hasard sur la vitre très propre du bar. Il pouvait voir jusqu'au comptoir. Comptoir derrière lequel l'œil flamboyant de son ami Barbe Noire le transperçait à distance, si expressif qu'Iwi crut véritablement entendre sa voix gronder dans ses oreilles : "Tu fais fuir mes clients !" Iwi lui adressa un sourire pâle et un petit signe de la main et Barboune détourna la tête. Nul doute que la prochaine fois qu'il voudrait trinquer chez lui, il aurait à passer par un petit quart d'heure de bouderie.

Iwi connaissait une clinique pas très loin, mais il se souvint aussi d'une pharmacie dont il appréciait la vieille gérante - c'est-à-dire qu'il adorait tourmenter. Il songea que ce serait beaucoup plus drôle d'aller là-bas avec ses vêtements ensanglantés et son teint aussi frais qu'un cadavre que d'être simplement reçu par des médecins anonymes. Il en prit donc aussitôt le chemin, titubant et gloussant légèrement, avant de se rappeler quelque chose.

- Au fait, je m'appelle Iwi Kaligula. Meister de Shibusen de fraîche date, à ton service.

Il continua à s'éloigner, la tête courbée.

- Ravi de faire ta connaissance, tout ça...

Il balaya toutes ces futilités d'un geste négligent.

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Iwi s'était levé. Il se dirigeait vers une petite pharmacie, dans laquelle un vieille femme travaillait, d'ailleurs, Anakara la connaissait bien. C'était une vieille pau qui passait son temps à grogner. Elle viré de son disque dur les processus déclenchant les formules de politesse.

-Hmm... j'aime pas trop cet endroit, et puis, ça va beaucoup mieux, tu sais, pas besoin d'aller me soigner ! Sur ce, j'y go ! Et ravi d'avoir fait ta connaissance.

Anakara s'éloigna, il avait décidé de rentrer à Shibusen et de se reposer un peu. Ce combat l'avait exténué, en réalité, il avait mal, mais ne voulait pas le montrer à Iwi. Il avait beau avoir fait la paix avec le manieur, un esprit de compétition continuait à dominer entre eux. Il poursuivit son chemin, jusqu'à ce qu'il rentre dans sa petite chambre. Il s'allongea sur son lit, soupira, puis s'endormit rapidement...

[HRP = Bon, on a fini le RP, je pense que tu n'as plus qu'à clôturer le topic en postant un dernier message, et tu iras poster le lien dans les RPs finis, ok ? Merci ! :D]

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[HJ : ainsi soit-il !]

Le Yokaï déclina poliment son offre et s'en alla, prétendant que "ça allait beaucoup mieux" mais vu son propre état, Iwi en doutait fortement. Il analysa rapidement l'ensemble de l'évolution de leur relation : la dispute débile, le combat plein de haine, le match nul et le dénouement diplomatique. Soudain, tout ça lui parut si incommensurablement drôle que malgré ses blessures, il s'autorisa une nouvelle explosion de rire. Ça lui fit mal, mais mal ! Il tomba à genoux en se tenant le ventre. La souffrance n'apaisa pourtant nullement son hilarité. Il venait de réaliser que son nouveau copain et rival l'avait quitté sans lui donner son nom. Il n'avait pas la moindre idée du gars à qui il avait affaire. Ils venaient tous deux de vivre une scène digne des plus touchants dessins animés pour mômes, avec poignée de main solennelle, étoiles dans les yeux, promesses d'une alliance indéfectible et cetera et cetera, et il ne savait pas son nom. Il imaginait très bien leur prochaine discussion : "Hey mon ami ! T'as bien récupéré depuis la dernière fois ? On se fait un petit duel pour se dérouiller les muscles ? Oh, au fait, c'est quoi ton petit nom ?" Il s'effondra sur le côté, mort de rire. En fait, c'était pas si drôle que ça, mais son sens de l'humour était à lui.

- Hé, ça ne va pas ?! Qu'est-ce que tu fous avec tout ce sang sur toi ? C'est du vrai ?

Impossible de répondre à cet homme serviable. Sa sollicitude ne fit qu'aggraver la crise. Convaincu d'avoir affaire à un fou, et en cela pas si éloigné de la réalité, le monsieur tenta de le relever et tacha son beau costume gris clair. Iwi rit encore plus fort en voyant ces souillures. Il était à deux doigts de l'étouffement.

- Bon, écoute, t'es dans un sale état, calme-toi, je vais te mener chez la pharmacienne...

Cette fois, Iwi étouffa pour de bon, ou peut-être pas. En tout cas, s'il mourut, il ressuscita et adressa au passant compatissant un geste apaisant.

- T'inquiète... t'inquiète... je maîtrise la situation ! HAHAHA JE CONNAIS PAS SON NOM !

On peut imaginer le reste. Quarante minutes de fou rire, de désinfection, de points de suture, de traversée de couloirs de clinique et d'échappement-de-justesse à une batterie d'examens psychiatriques plus tard, Iwi réintégra son paisible chez-lui et à l'image de son ami félin, il plongea dans son lit et un profond sommeil.

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