6H pétante du matin.. couchée au beau milieu de son lit.. les yeux écarquillés fixant les interstices des volets ouverts appartenant à la fenêtre du quatrième étage de cette chambre d’hôtel, les gouttes de sueur perlaient le long de son front, l’envie de bouger ne lui était toujours pas revenue quand à elle. Les choses c’étaient pourtant bien déroulées hier soir encore lorsque Luxia venait simplement récupérer quelques affaires avant d’emménager chez son nouvel amoureux, le gardien Stephen, tout c’était merveilleusement bien passé pour elle mais ce n’était que de courte durée.

En pénétrant dans la fameuse chambre, l’envie de piquer un petit somme à la vue du lit, fut plus forte que n’importe quelle autre priorité, entrainant Luxia en sa direction qui prit à peine le temps d’enfiler son pyjama très ‘léger’. Toute sa fatigue était surement du au manque de sommeil expliqué par le fait qu’elle ne put pas vraiment profiter de la nuit dernière puisque la jolie weapon n’avait pas réellement eu l’occasion de dormir, étant assez occupée avec son amant.

Ce qui justifia sans doute, que la jeune demoiselle n’eut que très peu de mal à trouver le sommeil presque immédiatement après s’être allongée, sans même prendre la peine de préparer ses valises, vérifier le contenu du minibar comme elle le faisait à chacune de ses venues, ou profiter simplement de la salle de bain.

Néanmoins les problèmes décidèrent de pointer le bout de leur nez en plein sommeil, en effet, jusqu’à maintenant Luxia passait des nuits terribles cauchemardant sans cesse, certainement causé par le traumatisme provenant de la mort de ses parents, cependant le cauchemar en question ne faisait en aucun cas part de cet événement ci oh que non.

L’épicentre de cette hantise même, ce qui en était l’acteur principal, possédait un nom en cinq lettres, un personnage que la cristal katana avait déjà rencontrée, même si l’incompréhension fut la première chose à ressortir de cette entrevue, elle était loin de l’avoir oubliée, que ce soit son arrogance ou leur ressemblance frappante ou même le lieu si étrange de leur ‘rendez-vous’ sans cesse à contrecœur.

Oui cette dite Cyana, ne cessait guère de la hanter et ce sous aucun prétexte, que voulait elle exactement, de quel héritage parlait elle, que voulait elle dire par là, pourquoi semblait elle si bien connaitre la jolie weapon, pourquoi cette sensation d’angoisse faisait elle surface sans arrêt chez Luxia à la vue de cette espèce de jumelle dont uniquement une simple couleur les séparaient physiquement. Inlassablement, la même scène comportant les mêmes paroles se répétaient sans cesse, presque de manière autoprogrammée, mais dans quel but instauré un tel manège, les détails ne différaient jamais, mise à part cette unique fois là.

En effet, la mystérieuse individu ne s’était pas seulement contentée de répéter brièvement son texte comme à chaque fois, non cette fois ci elle affirma qu’elle ferait tout ce qui est en ce pouvoir pour s’assurer que Luxia fasse ce qui doit être fait, quitte à y perdre la vie. Déboussolée, la jeune demoiselle n’eut point le courage de bouger, plus qu’agacée et ennuyée vis-à-vis de toute cette incompréhension, lorsqu’elle était enfin revenue à elle-même, il lui fallut quelques minutes de réflexion, qui s’agissaient d’heures en vérité, passées aussi rapidement que des minutes à ses yeux.

Quasiment scotchée à son lit, anxieuse comme jamais, tout en ignorant pourquoi, il lui fallut fournir un effort considérable pour se diriger jusqu’à la salle de bain, et même éveillée, les frayeurs ne s’arrêtèrent pas pour autant. En apercevant son reflet dans la glace la jolie italienne sursauta complètement faisant presque un bond en arrière, de peur de revivre une mauvaise expérience avec un miroir, déjà vécue dans cette même chambre d’hôtel auparavant.

Après s’être rincée le visage en mettant bien plus de temps que prévu, la jeune demoiselle rassemblait le peu de ses affaires lui venant à l’esprit et enfila en vitesse les premiers vêtements lui tombant sous le nez, ne cherchant point à afficher un style quelconque comme elle en avait si bien l’habitude de le faire. Sans même savoir quoi faire ou où se rendre, la jolie italienne, se stoppa seulement quelques minutes face au miroir, admirant son reflet intriguée par sa fameuse et récente cicatrice lui parcourant presque tout le haut du corps de façon gracieuse, rappelant nombre de fois qu’elle frôla la mort ce jour ci.

Ne se préoccupant plus de rien elle quitta l’hôtel puis finit par errer dans les rues bondés de Death City le regard presque vide, l’on aurait dit une enveloppe charnelle sans âme mais une lueur d’espoir, provenant d’un souvenir lointain parvint jusqu’à ses pupilles dont l’étincelle fragile semblait presque éteinte.

Ce souvenir n’était ni plus ni moins Squire, il semblait différent, presque préoccupé, les deux personnes se remarquèrent mais il n’attribua qu’un regard à la jolie weapon, pour quelle raison, se demandait Luxia faisant demi-tour, hésitante venant à peine de reprendre ses esprits elle n’était que peu sure d’elle, mais scanda tout de même en sa direction.

« S..Squire.. c’est toi..?! »

Etant déjà passé à Death City à contre-cœur dans le cadre de ses recherches désespérées pour retrouver la seule entité sur qui il avait jamais pu compter, et ces pistes n'ayant jamais abouti qu'à plus encore de désespoir et à des preuves de plus en plus concrètes de la fatalité, Ace avait la nausée rien qu'à l'idée de fouler à nouveau les pavés encrassés de la ville. Cependant, alors que son entrée lui rappelait de façon lugubre, l'idée insupportable que l'ame de son frère d'armes puisse errer flottante ou demeurer coincée dans les entrailles putrides d'un démon sanguinaire, une de ces créatures ayant sans hésitation, cédé à la peur et à tous les vices qui rongent les entrailles de l'Homme et renié toute humanité jusque dans le plus profond recoin de leur âme. La Demoniac Buzzsaw ne se déplaçait pourtant pas dans un but particulièrement déplaisant, bien au contraire, il s'agissait de revoir une personne dont il n'avait pas eu de nouvelle depuis le tristement célèbre ''Accident Kreiss''. Aline, en l'occurrence, son premier coup de foudre, son premier chagrin d'amour... son premier deuil. Quand on parle de déception amoureuse avec un adolescent, c'est généralement de querelles et de ruptures de pacotille... pas de la perspective quasi-certaine d'avoir perdu sa douce sous une bâche plastique enflammée par l'armée sans pitié ni discernement d'un régime en ruine, ou celle d'un légionnaire sanguinaire la criblant de projectiles d'acier... Ce n'est que la plaie béante dans son cœur, ouverte par la perte de la dernière personne qui possédait sa pleine confiance, la personne avec qui il avait dépassé ses limite, surmonté ses douleurs et triomphé de ses ennemi; la personne entre les mains desquelles il avait fendu les airs et les cranes, dont il avait senti l'onde fuser dans ses veines, qu'il avait amplifié pour venir à bout de dizaines de problèmes, avec qui il avait lié son âme pour libérer tout son potentiel en combat; qui avait pu rappeler à sa mémoire la déchirante douleur de la perte de son premier coup de foudre, la plus belle de toutes les funambule, la déesse des câbles, pour qui brillait son amour d'une lueur si... artificielle. Comment pouvait-il ressentir comme artificiel cet amour dont le souvenir lui était si pur?

Il était maintenant engagé depuis plusieurs centaines de pas dans la ville où devait à présent se jouer un acte fatal d'un drame qui aboutirait à la mort inévitable et imminente d'Ace ''Squire'' Kreiss, l'écuyer et vedette du cirque le plus tristement célèbre de l'histoire du divertissement. Mais ne nous égarons pas trop du coté du funeste destin de notre protagoniste, d'autant plus qu'il s'agit en fait de son lointain passé... la fatalité nous rattrapera quand il le faudra, nous aurons beau courir, nous n'y pourrons échapper! Le futur macchabée marchait, bouleversé et incrédule quant à ce qui était sensé lui arriver, rencontrer Aline alors qu'il la croyait six pieds sous terre, mêlée d'ogives d'acier ou de plastique fondu, et ce, depuis des années! Il vit, en débouchant sur une place légèrement plus animée que le reste de la ville qui, de toute apparence, était de premier choix pour quelqu'un recherchant du calme et de la tranquillité, une fontaine à l'eau si limpide qu'elle réussit à le distraire durant un court instant de sa réflexion, lorsqu'une vision horrible lui apparut dans l'eau: son propre reflet (Non ne riez pas). Tout d'abord il fut surpris quand il se pencha au dessus de l'eau de voir qu'il avait un sourire de psychopathe sadique gravé sur le visage... alors il décida de l'effacer mais se rendit vite compte que ça ne changeait en rien son apparence, comme si son visage était figé. Il voulut tenter de toucher ses propres traits du bout des doigts mais ne put que constater avec effroi que sa bouche était serrée et fermée tandis que son reflet continuait à le fixer avec ses dents bien visibles et un large sourire. Ce qui lui donna envie de hurler de peur ce fut de se rendre compte que tandis que sa main droite était posée sur sa bouche, celle de son reflet était tendue vers l'avant, et bientôt, lui attrapait le col pour l’entraîner dans l'eau.
- Coucou!
- Brghblghllbhrg!
- N'insiste pas, tu ne fais que te remplir d'eau et tu sais tout comme moi que nous ne voulons pas mouri...
- Ca va monsieur, attendez ne bougez pas j'appelle les secours, ahh oui allô?
Un homme avait vu l'arme s'évanouir et tomber la tête dans l'eau. Il s'était donc élancé pour le sauver, l'avait tiré de l'eau avec précipitation et s'était empressé d'appeler les secours, mais à peine en contact avec eux, il s'était tourné et avait pu constater la disparition de la victime.

Un jeune homme, plutôt grand, blond, cheveux courts, coiffé style normal, respectant tellement bien les lois de la gravité qu'il en aurait donné la nausée à un mangaka, marchait dans une des rues de cette ville aussi répugnante aux yeux du futur cadavre. Si une musique ai forte qu'elle lui promettait une surdité rapide, ne lui avait pas irrigué les tympans
(à dire vrai, les paroles parvenaient intelligiblement aux oreilles des passants alors que son casque était serré autour de ses esgourdes: ''I'm tired of being mat you want me to be''...), il aurait remarqué qu'il croisait un homme qui, alors que le soleil lui tapait sur la peau de façon oppressante, était trempé jusqu'à la moelle, comme s'il venait de plonger dans une fontaine... mais où va la jeunesse? De plus en plus isolée, enfermée dans son monde, dans sa musique, dans son univers virtuel. Mais ce n'était pas pour se poser de telles questions que Ace avait cheminé. C'était un détective, à la réputation plutôt saine, qu'il avait engagé pour retrouver des traces des survivants de ''l'incident'' Kreiss. En effet il avait récemment appris que ces derniers étaient au nombre de trois, Squire ne s'étant pas présenté aux autorité sous le nom de Kreiss depuis l'incendie du cirque principal de la K.I.E.C, ce devaient être trois autres personnes. Il avait alors payé les services d'un détective pour en retrouver la trace.
-Helena Smith pas très original,-lui avait annoncé le détective-mais c'est la seule que j'aie pu retrouver.
-Ce nom ne me parle pas, vous êtes sur que...
-Aline Labeyrie.
-Comment?!
-C'est son vrai nom.

Cependant, rien de tout ça n'affectait l'arme qui, tétanisée de peur, fuyait une menace qui ne la suivait pas, à vrai dire, les douleurs insensées qu'il commençait à ressentir lui donnèrent l'impression que son propre corps se rebellait contre lui, qu'il était enfermé dans un espèce d'ennemi de chair. Essayez un instant de vous imaginer un instant enfermé dans une prison de la même taille que vous, ayant tout droit sur vous... vous comprendrez aisément pourquoi Squire se retrouva quelques secondes plus tard dans une ruelle entre deux bâtiments en train de rendre aux pavés son petit déjeuner... Il fallait à tout prix qu'il trouve une échappatoire, il devait à tout prix, pour ne pas tomber raide au milieu de la rue, se rappeler pourquoi il était là, pourquoi il trimbalait ses tripes dans un endroit de ceux qui le répugnent tant. Alors il vit, se dressant comme un miracle face à lui, le...
-Death Coffee, c'est son lieu de travail, à Death City, Nevada

Une femme, rousse, la quarantaine, plutôt sobre, l'air reposée, aurait vu un cinglé en costard trempé entrer dans le café, si son attention n'était pas focalisée sur le livre qu'elle tenait dans sa main, une importation française ''Cosmétique de l'ennemi'' d'Amélie Notomb. À en croire le regard de la vieille(si, si, je suis désolé, quarante ans c'est vieux), ça avait l'air passionnant, encore fallait-il comprendre une langue parlée par un peuple que Ace qualifiait de cœur de la corruption du monde, et ses anciennes colonies, généralement basées sur le continent africain. Ca le tuait de se dire qu'il avait pu porter un être aussi pur et raffiné qu'Aline, il en avait même la nausée quand il se disait qu'il avait des chances d'avoir eu cette même nationalité à sa naissance... il ne le saurait sans doute jamais. A vrai dire, il le saurait bien assez tôt, et malgré sa propre volonté, mais enfin, je n'ai pas pour but de vous gâcher la lugubre surprise, donc j'essaierai d'en rester là ou nous en sommes. Belle, elle était splendide comme l'avait longtemps rêvée Squire, terriblement pure, douce, éteinte. Elle ne vivait plus, ses yeux ne transmettaient plus aucun enthousiasme, elle était usée. A vingt-cinq ans, elle n'avait plus de force, plus de charisme, plus de jeunesse, elle travaillait, elle vivait (survivait) un quotidien monotone, elle n'avait plus de rêves ou se cacher, plus d'idéaux pour la guider... aucune illusion, juste la cruauté d'un monde de machines, plus que d'humains, prise en pleine tête, comme une vague colossale qui avait emporté avec elle son enfance et l'avait privée d'adolescence et de ses rêves et illusions. Sauf que cette vague n'avait rien d'aquatique... c'était une vague de feu de larmes, de sang... une pluie de sang, de douilles. Elle voulait être funambule et acrobate... une balle perdue se devinait dans sa jambe droite, à sa cadence si peu harmonieuse, un destin brisé par une détonation qui n'existait pas officiellement. C'était pour ça qu'elle avait changé de nom, pour ça que le détective n'avait pas retrouvé les deux autres, aucun témoin ne devait être en mesure de dire que l'incendie Kreiss était un raid de l'armée mené contre des civils, ''l'incident'' Kreiss ne devait rester qu'un incident.

Comme Ace restait planté devant elle après l'avoir saluée, elle se sentit obligée de li demander:
-On se connait?
Trois mots, trois poignards qu'elle lui enfonçait dans le cœur...
-Aline.
A l'intant où il terminait de prononcer, il sentit comme une sensation de ''j'ai fait une connerie''... Il n'avait pas tort pour une fois sur ce coup là... En boitant légèrement, elle se mit à courir pour sortir du café et s'éloigner de lui, il lui courut après et la rattrapa aisément quelques mètres plus tard.
-Attends!
-T'es qui toi?
-Ace.
-Quoi?!
-Ace, tu te rappelles pas? Le cirque, le petit-fils du vieux
Elle s'éloignait tout doucement en rétorquant:
-Arrete! Mais putain t'es qui?!
-Mais enfin...
Elle semblait bouillir de rage et ses yeux dégageaient en fin une émotion... mais pas la bonne. Elle lui cracha au visage puis s'emporta:
-Ta gueule! Ecoute moi bien connard, tu t'es bien renseigné mais pas assez, Ace est mort, je l'ai vu gisant dans son sang!
-Non c'est f...
-Me coupe pas la parole, l'enflure! T'es pas un bon acteur et tu ne ressemble absolument pas à Ace Kreiss.
Voyant la tournure des évènements, Squire se rendit compte qu'il devait user de la seule preuve concrète qu'il avait...
-Suis moi.

L'ayant entraînée dans un coin sombre, il lui révéla sa forme partielle qui tira un cri d'effroi du gosier de la française lasse de la vie. Voyant que rien ne se passait comme prévu, il s'inquiéta:
-Convaincue?
-Que tu es un monstre!
-Mais tu te souviens pas, c'est mes jambes qui ont fait de moi la bete de foire vedette du chapiteau
-t'as vraiment pas un seul renseignement potable – lui lança-t-elle, méprisante, entre larmes et rire – Non, cracheur de feu, il était le meilleur cracheur de feu que la terre ait porté, c'est ce qui en a fait une vedette.
Cette révélation laissa Squire sans voix, ça lui paraissait irréaliste, et pourtant, c'était jouant avec le feu qu'il s'était toujours vu lorsqu'il rêvait de son enfance, comment était-ce possible *Am I really Ace? Qui suis-je si je ne suis pas moi?* Il laissa Helena retourner au bar sans vraiment se rendre compte de quoi que ce soit, puis, se tenant contre un mur, se plia en deux de douleur lorsqu'il dut vomir alors que son estomac était vide, puis il se mit à marcher dans les rues, sans but, sans regarder devant lui, il savait juste que si il se trouvait à nouveau devant la fontaine, il s'y jetterait. Il lui sembla discerner un visage familier en marchant... peut-être deux, peut-être cent. De toute façon...