Me voilà dans de beaux draps... En face de trois chiens gigantesques d'un pelage noir de jais, baveux, grognons et prêts à me bouffer.
Oups pardon ! Je me suis trompé de passage, remontons un peu plus loin dans le passé, jusqu'au moment ou Tsumaki passait dans le couloir du Hall des Missions et qu'un petit groupe de trois personnes observaient l'une des missions avec rire. Je les entendaient en train de parler d'un agriculteur qui avait perdu ses vaches qui s'étaient enfuies dans la forêt en face de sa ferme à cause d'un chien errant qui leurs auraient aboyés dessus. L'un d'eux se mit à s'esclaffer, en se demandant pourquoi Shibusen devrait s'occuper de ce genre de mission et qu'il n'avait qu'à se débrouiller tout seul, puis ils quittèrent le hall en riant. Je fixais le post-it accroché au mur pendant quelques secondes, un mystère auréolait cette mission, ce gars avait raison : Si cet agriculteur avait fait appel à Shibusen, c'est qu'il y avait sans doute un danger derrière, et un danger qui pouvait se qualifier de pré-démon qui serait sans doute ce "chien errant". Pourquoi pas, après tout ce sera sans doute plus intéressant que les cours en ce moment, et puis ce n'étaient pas les notes qui me manquaient. Et puis, un peu d'action, ca ne fait jamais de mal, enfin, façon de parler.
Je commençais alors à préparer mon sac par habitude, mais je me suis rendu compte que cela ne servirait probablement à rien, puisque l'agriculteur habitait dans cette ville, à Death City, et il serait fort surprenant que la mission dure plus d'une journée entière, et puis je pouvais partir tout de suite. Je déposais alors mon sac à côté de mon lit dans le dortoir des garçons et empoignais mon brassard à câbles, question de sécurité si un pré-démon devait apparaitre, et les chances étaient peu minces. Je descendis les escaliers de l'académie et je traversais les rues quasi-désertes de Death City, je me demandais d'ailleurs quand est-ce qu'il y aura du monde dans ces rues, par-ce que le jour ils sont tous occupés à travailler, et la nuit ils dorment tous, alors ils prennent jamais l'air ces pauvres gens ? Ah les pauvres, enfin bref, là n'était pas la question.
Après quelques minutes, environ une dizaine pour être précis, de marche, j'apercevais enfin la ferme indiquée sur le papier. Un chien plutôt massif à poil brun attaché à une niche près de la porte d'entrée se mit à aboyer sur moi en tirant sur sa chaine qui le retenait de me sauter dessus. Le fermier sortit alors de sa demeure en s'essuyant les mains, un chapeau de paille sur la tête et une salopette en jean sur une chemise à carreaux rouge et blanche pas très immaculée. Il me salua en me serrant la main d'une bonne poigne qui faillit me tordre une grimace. Il m'invita à rentrer dans sa maison à côté de sa ferme et me servit un verre de vin pendant qu'il m'expliquait la mission en détail dans le salon avec d'autres fermiers. Après quelques minutes de discussion, il me montra le champ dans lequel le bétail avait l'habitude de gambader.
Désert.
Pas une seul présence n'environnait aux alentours, c'était à la fois impressionnant et à la fois inquiétant. Les bovins avaient beau avoir une intelligence limitée et un esprit de groupe solide, on voyait rarement des vaches enfoncer un grillage pour s'enfuir sous la peur. Je m'approchais de la grille, elle avait été piétinée par le troupeau et des pas de bovins s'enfonçaient jusque dans le fin fond de la forêt qui avoisinait la ferme. Je partais à la recherche du troupeau en m'enfonçant vers le chemin qu'elles avaient laissés, en compagnie du chien du fermier pour pouvoir faire rentrer le troupeau sans trop de difficulté, les autres fermiers prenant une direction différente de la mienne pour retrouver le chien. Après quelques secondes de marche, quelque-chose me choqua immédiatement : Des traces de pas. Pas des pas de bovins, mais des pas de chiens, mais beaucoup trop grosses pour appartenir à un chien normal comme celui à côté de moi... Je me suis mis à courir sans savoir pourquoi, peut-être par peur pour le reste du bétail, ou peut-être par peur de ma propre survie. Ce sentiment m'envahissais, mes membres tremblaient et mon corps devenait lourd, mais je ne devais pas perdre les traces du troupeau, même si j'avais "peur", je devais remplir ma mission.
C'est un beuglement qui me ramena sur terre, et quelques mètres plus loin, je retrouvais le troupeau. Le chien se plaçait dans la direction opposée et se mit à aboyer pour ramener le troupeau vers la ferme, qui se mit à obéir sans broncher et le groupe s'enfonçait vers le chemin emprunté il y avait quelques secondes. Les vaches rentrèrent dans le pré qu'avait été réparé pendant ce temps, et je me dirigeais vers le fermier qui attendait sur son fauteuil dans son salon. Soudain, des bruits de pas rapides s'approchaient de nous et l'un des amis de l'agriculteur entrait en panique, immaculé de sang et terrorisé.

« Ce... Ce n'est pas un chien ! C'est... C'est un monstre !! CE SONT DES MONSTRES !!! »
« Sont ?! »
« Ils ont tués une des vaches, ILS L'ONT BOUFFÉE ! J'ai pu m'enfuir... Je crois... »
« Merde...! »
« P'tiot ! »

Je me précipitais dehors, voyant avec horreur ce qui se tenait devant-moi à ce moment : Un... Non, trois chiens, au pelage court et d'un noir de jais profond, des yeux rouges qui me fit parcourir un frisson dans le dos, et une taille colossale ! Au moins deux mètres de haut ! Ils étaient baraqués comme une armoire à glace, mais version chien ! Et le pire, c'est qu'il y en avait trois ! L'un d'eux se mit à ouvrir sa gueule et ses dents se rapprochaient dangereusement de ma chair. Par un réflexe surhumain relevant du miracle, je plaquais mes mains contre ses mâchoires pour l'empêcher de me bouffer. Sa force était herculéenne, il était clair que je n'étais pas de taille contre ce monstre, mais le pire c'est que le deuxième allait m'écorcher par la droite, mais soudain, je me poussait en arrière et la gueule du premier mordit la gueule du deuxième qui allait m'arracher les côtes. C'est alors que sous un gémissement aigu, le premier se mit à attaquer le deuxième qui l'avait mordu et sous une lutte... canine, un coup de griffe vola vers le troisième qui se contentait de regarder la scène et se mêla à la bataille.

« Ils se bouffent... entre eux...? »

J'étais abasourdi, complètement hébété par la scène qui se passait sous mes yeux : Les chiens se bouffaient entre eux, ils ne faisaient pas que se mordre comme la plupart des chiens, mais ceux-là se plantaient les crocs dans leur chair et l'arrachait. Je n'y croyais pas, j'étais tellement hébété que mes jambes se plièrent et je me mit à genou devant le "spectacle" qui s'offrait à moi. Après quelques secondes de combat et une lutte bestiale acharnée, deux des Cerbères tombèrent à l'agonie, le sang dégoulinant sur l'herbe verte. Le dernier était sonné, il boitait et tenait à peine sur ses pattes. Je devais me ressaisir, et terminer cette mission ! Je me relevais et je me mit à courir vers le dernier chien qui me dévisageait. Je sautais alors sur sa gueule et je plantais mon bras contre son crâne qui se fissura sous un grand crac. Mes câbles s'allongèrent et s'éparpillèrent dans tout les sens. Le chien tomba a terre et les âmes de pré-démons apparurent sous mes yeux.
Trois âmes rouges flottaient sur l'herbe.
Après mes excuses pour une des vaches qui avaient étés digérés par les Cerbères et ses camarades qui n'étaient pas encore revenus, qui avaient sans doute partagés le même sort. Je rentrais alors à Shibusen, couvert de sang du chien que j'avais tué et une fois rentré dans les dortoirs, je m'allongeais d'épuisement, je n'avais pas énormément bougé, mais la peur qui m'avait empli m'avait épuisé. Le sommeil me gagnait et j'entrais dans le monde des rêves.