Malpoli, insolent, insultant et au langage plutôt grossier… Effectivement, il était Américain. Les sourcils de la jeune femme se froncèrent en l’entendant la qualifier de démone. Il faut dire que ses agissements n’étaient pas des plus flatteurs… Position de combat, expression agressive, paroles frustrantes… Il n’était pas venu pour prendre le thé apparemment. Ecaterina se détendit quand même suite à la première phrase. Il était jeune et inexpérimenté, il allait probablement se rendre compte de son absence de politesse et se reprendre. Mais non il la traite de Dévoreuse d’Âmes… Comment a-t-il pu OSER la mettre, elle, si belle, mystérieuse, gracieuse, polie et… dangereuse, sur le même niveau que ces êtres putrides. Comment peut-il être assez audacieux pour la comparer, elle, qui chasse une ou deux fois par mois pour se nourrir à des créatures qui tuent toutes les nuits pour gagner en puissance? Mais c’est encore pardonnable. Le pauvre jeune homme ne sait juste pas faire la différence entre un pré-démon et une véritable diable. Et il venait de Shibusen… aaaah… c’était donc cela cette odeur familière… Cette odeur qu’elle n’avait pas sentie depuis quelques siècles. Shibusen, cet institut qui l’a séparée de sa famille mais qui lui a aussi fait réaliser ce qu’elle était réellement. Son regard sembla se perdre dans la nuit alors qu’elle se remémorait souvenir après souvenir… jusqu’au meurtre de son père… par elle. Son père était comme elle, une créature de la nuit… mais aussi un Akuhei… et elle a du débarrasser le monde de son géniteur pécheur… et prendre sa place en tant que Maître du Domaine. Son regard était revenu, si l’on peut le dire comme ça, un regard féroce et concentré et dans lequel on pouvait voir une certaine rage qui commençait à bouillir. Cet individu venait sur ses terres, elle l’accueillait en bonne et due forme et lui, l’insultait. Ecaterina lui avait laissé deux chances de se rattraper et elle ne lui en laisserait pas une dernière.

"How can you even compare ME to one of those disgusting creatures? Are you so blinded by that academy of yours that you cannot see a Vampire Queen when you have one in front of you? Tonight, on this beautiful night, you step inside my domain, I greet you politely even though you’re violating my propriety and you DARE insult me? I usually hunt for food, not for power… But if you continue to put me on the same level as those atrocities, I will make an exception."

Elle se calma, passant une main sur sa joue pour replacer ses cheveux derrière son oreille. Elle expira et reporta son regard vers le jeune homme. Ce petit élan de colère l’avait peut-être effrayé mais elle ne supporterait pas une autre insulte. C’était déjà plutôt insolent qu’il ne daigne pas sortir de la forêt alors qu’elle était à découvert… Une conversation est toujours plus agréable lorsque l’on peut clairement voir le visage de son interlocuteur. Elle s’approcha de l’escalier et le grimpa pour prendre une vielle chaise métallique et la descendre à l’endroit où elle avait atterrit. Elle s’y assit et croisa les jambes sous sa robe et reprit la parole en admirant ses ongles.

"I helped the three girls in Ireland simply because those grotesque things were too much for me to handle alone. I wouldn’t be able to live if the world was covered with those bizarre creatures. They got out of your way; they got out of my way. Like you Americans say: Everybody wins."

En ce moment, elle aurait bien aimé avoir une tasse de thé… ou simplement un serviteur à qui demander une tasse de thé… Mais bon, ce serait grossier de laisser le pauvre étranger seul à l’extérieur alors qu’elle entrerait quérir un breuvage chaud. Il ne lui restait que deux questions auxquelles elle devait répondre puis ce serait son tour d’en poser… Ecaterina reposa son regard de feu sur l’arme et sourit doucement.

"Madness? I do not walk this path. I walk the path of the Night. Like my Father used to. That is, until I killed him… You know, I used to be a Shibusen student long… long ago. And on an assignment, I came back to this mansion about a year after I went to America and saw the place was a battlefield. There was blood everywhere and the source of it all was my father who chose to walk the path of Madness. My partner and I killed him… then she disappeared. That’s when I became the master here. As for a soul, of course I have one. A Soul covered in scars, blood, sorrow and pain. The pain of losing every single person you once loved… But I do not care for that anymore, for I do not need anyone anymore since I am immortal…"

Ecaterina se leva, alla replacer la chaise à sa place en haut de la dizaine de marches qui menait à la porte du manoir et poussa celle-ci.

"Would you care to join me for a cup of tea? You must be cold and hungry by now."

Cette question était rhétorique et la jeune femme disparue derrière la porte sans attendre la réponse de son interlocuteur.

Ecaterina se déplaçait à l'intérieur du manoir de sa famille comme une ombre. Elle connaissait si bien la bâtisse qu'elle aurait pu s'y diriger les yeux fermés. Elle ne prêtait pas beaucoup d'attention à son invité. S'il avait ne serait-ce qu'une base de civilité, il la suivrait sans demander son reste. Elle se mis à grimper l'escalier, ignorant le fait que l'arme semblait fortement impressionnée par la décoration. C'était la résidence d'une famille noble après tout. Il fallait qu'elle ait une allure digne de celle-ci sinon personne ne pourrait dire qu'un seigneur habitait ici. Ecaterina était habituée à ses vitraux, son large escalier, les rideaux déchirés par le temps et le vent qui recouvraient les quelques fenêtres où certains étaient encore accrochés. La demeure avait une ambiance lugubre en ce moment... mais si les chandeliers étaient allumés, l'ambiance qui régnerait dans la pièce ne serait que splendide. Elle glissa le long de l'escalier sans détourner la tête vers son invité et s'engouffra dans les couloirs. Il la rattrapa rapidement et la bombarda de questions... Au moins cette fois-ci il ne l'insultait pas. Il aurait pu dire ses phrases d'une manière plus élégante mais Ecaterina comprenait qu'il ne fallait pas trop en demander côté politesse à ce jeune homme...

"I am the master of this mansion. I've been living here by my lonesome since I took the place from my late father."

Sa voix était anormalement calme. Elle se sentait bien. Elle souriait. Elle s'engouffra dans une pièce plutôt sobre. Quelques sièges rangés autour d'une petite table, de grandes portes vitrées donnant sur une terrasse recouverte par des rideaux bourgogne troués qui laissaient entrer la lumière de la lune., quelques étagères remplis de livres qui pourraient tomber en poussière si on les ouvrait... Un petit salon en somme. Ecaterina se tint quelques secondes près de la porte pour laisser entrer son invité.

"Please, make yourself comfortable, I will be back in a few minutes."

Et elle disparu dans les couloirs. Ses pas n'émettaient aucun son. Elle descendit l'escalier et s'engouffra dans une porte qui menait à la salle à manger puis aux cuisines. La salle à manger était une salle sombre où trônait une large table rectangulaire pouvait facilement accueillir une trentaine de personne si ce n'est plus. Dans les cuisines, Ecaterina prépara rapidement le thé. Un mélange d'herbes qu'elle ne connaissait pas mais qu'elle adorait. Il colorait l'eau d'une douce teinte rougeâtre, avait un petit goût fruité et quelque peu sucré. Qu'est-ce qu'un humain mangeait? Est-ce qu'elle avait ne serait-ce que quelque grammes de nourriture dans ces cuisines ancestrales? Elle n'y venait que pour faire bouillir l'eau qu'elle utilisait pour son thé... Elle sortit par la porte de service des cuisines, étira ses ailes et s'envola vers le village. Elle était rapide et déterminé et fit le voyage en moins d'une minute. Elle marchait au centre d'une rue, son regard écarlate inhabituellement calme scrutant chaque recoin de l'endroit où elle était pour trouver un quelconque signe de vie... et elle fut rapidement servie. Trois adolescents marchaient en riant, virent ses ailes et se mirent à courir dans l'autre direction. Un coup d'aile et elle se retrouvait devant eux. Elle plaqua l'un deux sur un mur et il se mit à pleurer et la supplier de le laisser vivre. Jusqu'à maintenant, ce jeune garçon croyait que ce que les adultes racontaient à propos du manoir dans la forêt était un mythe... et bien maintenant il avait juste envie de rentrer chez lui et dire à ses parents qu'il les aimait.

"Silence mortal! I will not harm you if you answer my question."

L'adolescent se tut, se mordit la lèvre et hocha nerveusement la tête.

"Where can I find food?"

Elle était calme. Elle était belle. Elle était diaboliquement imposante malgré sa petite taille et ses yeux semblaient transpercer le jeune homme. Il avait l'impression qu'elle fixant l'intérieur de son crâne. D'un chétif geste de la main, il pointa l'autre côté de la route. Elle le lâcha et il s'effondra, inconscient. Se retournant, elle sourit doucement en s'approchant de la vitrine de la boutique.

Ecaterina entra dans le salon et posa le plateau sur la table. Une théière bouillante, deux tasses et leurs soucoupes et une petite assiette de porcelaine sur laquelle trônaient trois petits gâteaux. Elle s'assit à l'une des chaises et versa le liquide chaud dans les tasses. Prenant une brève gorgée de l'une d'elle, elle reprit la conversation.

"Pray excuse me for the wait dear guest, I had to run a little errand."

Ses ailes disparurent comme si elles n'avaient jamais été là et elle prit sa tasse.

"The path of the Night, my way of living, is simply darkness. I live in the shadows of the world, away and safe from the light, only so I can live my immortal life in peace. during the day, I sleep. Hidden from the cursed light of that sun of yours. When the moon comes, I wake up from my slumber and wonder what I could do to make this night eternal... Oh where are my manners... you need light don't you?"

Elle déposa la tasse sur le cabaret d'argent puis se leva, se dirigeant vers un bureau au fond de la pièce et y prit une allumette et une chandelle. Depuis sa découverte de ces petits bouts de bois qui créent des flammes, elle en avait toujours quelque part dans le manoir... pas qu'elle en ait besoin mais celà pourrait être utile une jour s'était elle dit... et ce jour était maintenant. Elle plaça la chandelle sur un chandelier puis l'alluma avant de le poser sur la table et de se rassoir. Son regard était ancré dans celui de son invité comme si elle fixait un point imaginaire derrière sa tête. Une fine touche d'agressivité commençait à y naitre...

"Now, please telle me what is the real meaning of your presence here, my dear American friend."