C'était une fraîche et habituelle soirée de printemps, dans les rues de Death City. Surtout dans l'ange de deux petites rues désertes, vides et pas très éclairées. Cette rue tournait dans un angle presque à 90°. Les fenêtres qui donnaient sur la rue étaient toutes fermées et des rideaux empêchaient que l'on y jette un oeil. Par endroit, des gouttières descendaient des toits et s'arrêtaient environ cinq centimètres avant le sol. Quelques bennes à ordures vides meublaient les rues, et quelques tags indéchiffrables recouvraient les murs.
Enfin "désertes", pas forcément. Enfoncé dans un coin, quelqu'un soupirait, en observant d'un regard vide ce qu'il avait en face de lui (une gouttière en l'occurrence), en attendant le sommeil.
Non il n'était pas un adepte de la nuit à la belle étoile, non il n'attendait pas quelqu'un pour faire un quelconque échange de quelconques je-ne-sais-quoi. Et le plus important : non il ne rentrera pas chez lui lorsqu'il se rendra compte qu'il est mal installé ou lorsqu'il aura mal au postérieur.
En effet, il n'avait nulle part où aller. C'était un "sans domicile fixe", un "sans abri", un "clochard", un "clodo" etc... Donc cette nuit il ne dormirait nulle part ailleurs que dans la rue. Comme d'habitude. Et il s'appelait Toutencarton.
Vu qu'il n'avait rien à faire de ses soirées, Toutencarton faisait appel à ses souvenirs. Il se rappelait sa première bagarre, ses premiers amis, sa première chasse. Mais vu qu'il n'avait rien d'autre à faire, il s'endormirait aussi sûrement à l'heure des poules.
Il soupira puis appuya sa tête contre le mur sur lequel il s'appuyait. Il aurait dut s'acheter un livre... Mais il ne lui restait que trente dollars. Les gens n'étaient vraiment pas généreux. Les gens se limitent aux stéréotypes sur les personnes différentes : "Si on donne de l'argent à un sans abri, il ira acheter de l'alcool, et ce n'est pas lui rendre service." Et bien non. Toutencarton ne s'achète pas d'alcool. Il ne boit pas d'alcool.
Le clochard s'ennuyait, enveloppé sous son manteau. Il comptait les passants qui se déplaçaient souvent le plus vite possible et sans jeter un simple coup d'oeil à Toutencarton. Il s'arrêta de compter lorsqu'il arriva a 12 passants après une heure.
Le soleil s'était déjà couché, la rue était plus déserte que jamais, quelques rats intrépides courraient silencieusement le long de la rue.
Le sans domicile fixe ne tarda pas a somnoler.

Rentrant d'une mission qui n'avait pas portée ses fruits, Adonis était revenu à Shibusen, montant les marches de l'escalier infini quatre à quatre, aucunement fatigué en arrivant au bout, comme n'importe quel étudiant qui se respecte de Shibusen, il était parti s'installer sur un des pics de l'institut, pour admirer le paysage, le soleil rigolard qui se couchait doucement. Quelque chose dans le paysage ne sonnait pas bien...en ce moment, les akuheis se faisaient de plus en plus calmes, et certaines missions ne s'avéraient être que de fausses alertes. Peut-être que cela ne tombait que sur lui, mais il se rendait compte qu'il y avait une accalmie alarmante dans le monde...Peut-être que Shibusen commençait enfin à porter ses fruits, et que la menace diminuait ? Peut-être que dans ce cas là, la menace serait bientôt totalement éradiquée ? Sans Akuhei avancé et sans sorcières, les forces de l'ordre basiques suffiraient largement à maintenir l'ordre, et les élèves de Shibusen seraient au chômage. Mais ce serait enfin la paix. N'était-ce pas ce qu'ils avaient toujours voulu ? Mais ce serait étrangement calme. Pour la première fois depuis qu'il avait intégré l'école, il se demandait ce qu'il adviendrait de lui si jamais il n'y avait plus aucune menace...il deviendrait sûrement garde du corps, ou quelque chose lui permettant de mettre ses capacités à profit...mais les combats ne seraient plus jamais identiques à ceux qu'il avait le plaisir de mener à cet instant. Il regardait le soleil descendre, et dans sa tête, il se dit qu'il ne devait pas se faire de plans sur la comète. Il y avait toujours des menaces bien réelles, et puis, cette accalmie, pour le garçon, avait des airs de grand calme avant la tempête. Il faudrait rester sur ses gardes...

Bien calé sur son pic, il resta ainsi à contempler le paysage jusqu'à ce que l'astre de soleil laisse la place à sa cousine de ténèbres, tout aussi hilare. La ville vue d'ici, avec toutes ses lumières qui s'allumaient une à une comme un sapin de noël était tout simplement somptueuse...Esquissant un sourire, le manieur se laissa retomber au sol, soulevant un léger nuage de poussière en retombant, comme quoi, l'équipe de ménage ne faisait pas toujours son boulot. Se rapprochant du bord de la petite plateforme sur laquelle était posée la bâtisse, il croisa les bras, observant le spectacle qui s'épanouissait sous ses yeux. C'était sublime, de se dire qu'il y avait tout ça de personnes en dessous de lui, qui vivaient tout simplement sans se soucier de la guerre que se livraient les forces du bien qu'étaient les étudiants de Shibusen et les Akuheis et sorcières démoniaques. Tout ça de gens qui savaient l'institut et ses exécutants suffisamment solides pour les protéger de toutes les menaces à venir, et toutes celles déjà présentes. Penser à ça lui donna un sourire encore plus grand, et il ouvrit les bras en grand, comme pour couvrir toute la ville dans son étreinte, criant en rigolant.

-Ne t'en fais pas, Death City, rien ne pourra t'atteindre tant qu'on sera là !

Après ça, il partit d'un gros rire, rabattant ses poings sur ses hanches. Comme c'était bon de rire à la façon de la lune, en plein soir de printemps, une brise douce rafraichissant le corps et vivifiant l'esprit ! Dieu qu'il se sentait bien ! Et il continua à rire, et à rire, et à rire jusqu'à...ce que son ventre le fasse taire, criant famine bien plus fort que lui ne pouvait jouer la carte du spectateur d'un comique doué dans son art. Ouais, ça faisait approximativement...depuis le matin qu'il n'avait rien mangé, ce qui pour lui, était un record. Il se mit alors à descendre les marches sans fin, allant dans le sens tout à fait inverse qu'à l'aller, sautant toujours les marches quatre à quatre, en profitant pour rectifier sa phrase précédente.

-Enfin, si on a le ventre plein.

Une fois arrivé en ville, il alla chez son petit marchand préféré, et prit un plat énorme de Sashimi de Baleine Fugu (cf : Toriko), animal assez rare et très difficile à cuisiner, venant d'un territoire perdu. Avec, il avait pris la sauce adéquate, ainsi que des escalopes à la crème, une bonne dose de riz, et une boisson noire et gazeuse, visiblement très connue en dehors de Death City, mais pas pour le jeune homme. Il lui semblait déjà en avoir vu durant ses escapades en Europe, par exemple, mais il n'avait jamais pris le loisir d'y goûter. Se baladant dans les rues, il avait le sachet dans la main, et goûtait les délicieuses tranches de baleine, celles qu'on lui avait donné, justement pour tester le produit sur le chemin, étant un habitué des lieux. Passant à côté d'une petite ruelle, il sentit son tatouage commencer à lui chauffer tendrement la joue, comme une caresse maternelle. Il revint sur ses pas, pour découvrir une petite ruelle sombre, dans laquelle résidait un clochard. Il ne sentait pas vraiment la rose, mais il n'avait pas l'air d'un mauvais bougre. Et cet odeur...Un flot musqué de souvenirs revinrent à lui, des souvenirs ayant l'odeur d'un bois champêtre, une odeur significative de liberté et de nature, une bouffée délicieuse de forêt dense et de feuilles parfumées. Il se rapprocha de l'inconnu, troublé, continuant de mâchonner ce qu'il avait en bouche. Il s'accroupit devant lui, le sachet toujours en main, prêt à se battre jusqu'à la mort si l'autre essayait de lui en voler, le regardant droit dans ses yeux qui semblaient clos.

-Si on enlève le côté "je me suis pas lavé depuis des mois", tu sens comme ma mère...

Les Yokaïs n'étaient pas vraiment célèbres, et Adonis n'avait jamais su ce qu'était sa mère. Elle ne lui avait jamais expliqué. Il observa le sans-abri, se demandant depuis combien de temps il n'avait pas eu un plat digne de ce nom à se mettre sous la dent. Il pointa son sachet du doigt, s'adressant à l'homme devant lui.

-Tu en veux ? J'en ai pris trois tonnes, de toute façon, je finirais jamais tout seul...

Il doutait fortement de cette dernière affirmation, car même si c'était vrai qu'il avait pris assez de nourriture pour tout un régiment, en plus des piques-assiettes, il avait un appétit d'ogre, et aurait pu finir tout ça sans problème. Mais il avait des questions à poser à cet inconnu...des questions auxquelles il n'avait pas pu répondre avant longtemps, qu'il n'avait même osé se poser. Il était persuadé qu'il y avait un lien entre sa mère et ce clochard, et il était bien déterminé à trouver quoi. Il n'avait de toute façon pas l'air bien dangereux, mais de toute façon, si jamais il tentait quoi que ce soit de menaçant, il ne restait plus qu'à le tabasser proprement, et passer son chemin...Mais il ne le pensait pas possible de tenter une attaque.

-Mais pas ici...J'habite à deux pas, si ça t'intéresse. Et puis tu pourras t'enlever cette couche de crasse qui te poursuit depuis des mois, à mon avis.

Il tendit la main à l'inconnu, avec un sourire en demi-lune.

-Adonis James Redwood, manieur de Shibusen. Enchanté.

[Ps : comme tu peux le voir, Adonis n'est pas quelqu'un de vraiiiment méfiant, et de toute façon, il est sûr de pouvoir te défoncer si jamais tu tentes quoi que ce soit. Il aime bien le contact, et est très généreux, sa réaction est donc toute naturelle ^^ ]

Toutencarton avait presque réussi à s'endormir dans cette ruelle. Ses yeux s'étaient clos, ses muscles s'étaient détendus. Il était paisible.

-Si on enlève le côté "je me suis pas lavé depuis des mois", tu sens comme ma mère...

A l'écoute inattendue de cette phrase, le Yôkaï ouvrit subitement les yeux. En face de lui se trouvait un grand homme musclé aux cheveux argentés qui mastiquait quelque chose. Celui-ci s'était accroupit et tenait un sac. Toutencarton sentit tout de suite l'appétissante odeur de nourriture qui s'en échappait. C'était de la nourriture japonaise. L'homme paraissait sûr de lui. D'ailleurs le clochard ne savait pas trop comment prendre ce qu'on lui avait dit. Il aurait bien répliqué, mais - par respect - il n'aurait pas pris le risque de laisser sentir a l'inconnu un relent de non-brossage de dents.
Celui aux cheveux d'argents pointa le sachet du doigt et ajouta :

-Tu en veux ? J'en ai pris trois tonnes, de toute façon, je finirais jamais tout seul...

Toutencarton eut un sourire timide. Depuis deux mois qu'il habitait Death City, c'était la première fois que l'on lui proposait quelque chose à manger. D'habitude, c'était une pièce de quelques cents qui traînent au fond de la poche et qui gène, alors on la laisse tomber sans un regard à quelqu'un qui en a besoin. Et peut-être que Toutencarton pourrait se faire un ami ce soir-là. Ou juste une connaissance, peut importe. Pour la première fois depuis qu'on lui refusa le travail de serveur dans un bar plutôt fréquenté, l'espoir renaissait. Ce n'était pas un espoir lui permettant forcément de sortir de la rue, mais l'espoir d'avoir quelqu'un sur qui compter au cas où on en avait besoin.
Mais peut-être qu'il exagérais. Si ça se trouve, l'homme aux cheveux argentés, c'est juste quelqu'un qui a pitié et qui, une fois qu'il sera sûr de ne pas avoir de remords pour avoir laissé quelqu'un crever de faim dans la rue, le laissera dans sa crasse pour de bon.

-Mais pas ici...J'habite à deux pas, si ça t'intéresse. Et puis tu pourras t'enlever cette couche de crasse qui te poursuit depuis des mois, à mon avis.

En fait, l'homme était peut-être quelqu'un de simplement généreux. Et se laver ne paraissait pas forcément être une mauvaise idée non plus. Pendant un instant ou deux, Toutencarton pensa à voler un savon, pour pouvoir au moins se laver dans une fontaine ou une bêtise dans le genre. Mais ce ne serais pas reconnaissant envers la personne qui aurait été généreuse avec lui. L'homme accroupis sourit, tendis la main et dit :

-Adonis James Redwood, manieur de Shibusen. Enchanté.

Définitivement heureux de cette rencontre, Toutencarton saisit la main du dénommé "Adonis" et se releva en tirant le légèrement sur la main qui lui était proposée. Une fois relevé, le clochard faisait à peu près la même taille que l'homme blond, mais il était beaucoup plus fin. Le Yôkaï prit enfin la parole, avec son accent russe bien prononcé et en essayant de garder pour lui sa mauvaise haleine. Il avait quelques difficultés avec la langue, mais pour ce soir, ça devrait aller.

-Moi je m'appelle Jules Toutencarrrton. Enchanté moi aussi.

Le sans abris esquissa un autre sourire amical.

Effectivement, ce qu'on pouvait dire, c'est que cette façon d'aborder quelqu'un n'était pas triste. Malgré tout, c'est le premier truc qui était venu à l'esprit du manieur aux cheveux argentés, qui avait hérité de sa mère un odorat assez développé. Il ne bougea pas d'un cil en voyant l'autre ouvrir les yeux d'un coup, non non, il était bien trop concentré sur sa nourriture, qui ne cessait de déployer son goût en lui, jusqu'à ce qu'il l'avale. Un véritable délice...Il adorait vraiment ce restaurant, qui faisait de la nourriture de tous les endroits possibles, avec des ingrédients rares, dangereux, et délicieux (Adonis était encore trop faible pour capturer ne serait-ce que la moitié des bêtes nécessaires pour certaines préparations ! ). Il voyait bien que l'autre ne répondait rien...Pendant un instant, il s'était dit qu'il était peut-être muet, avant de se dire qu'au vu de la situation, il y avait plus de chance qu'il soit tout simplement surpris et pas forcément en confiance avec la situation...Il y avait bien des gens qui s'amusaient à tabasser les clochards, parfois, tout simplement parce qu'ils les considéraient comme des déchets...Enfin, pas à Death city, ici, les rues étaient plus ou moins propres et la racaille vite disciplinée. C'est donc pour le rassurer qu'Adonis adopta un sourire amical et franc, cachant sa perplexité par rapport à l'odeur significative et étrange du sans-abri.

Sur les yeux de l'inconnu, il pouvait lire de la surprise. Après tout, les gens n'étaient pas forcément généreux avec ceux sans le sou, et Adonis n'avait jamais été très près de son argent, et n'était pas quelqu'un de méfiant par nature. Après tout, il avait suffisamment confiance en sa puissance pour ne pas avoir à se méfier. Pour lui, si quelqu'un qu'il aidait ou à qui il faisait confiance l'attaquait...Il n'avait qu'à lui carrer une patate au milieu de la figure pour lui dire d'aller se faire voir ailleurs ! C'était comme ça qu'il faisait, le ch'ti manieur, après tout ! De temps en temps, il fallait laisser parler ses poings, nom de nom ! Il espérait que celui qu'il avait en face de lui ne refuserait pas son invitation, en tout cas...Il était la réponse à plein de choses, et puis, en plus de ça, il allait surement pas tarder à crever de faim, si c'était comme ça. La faim pouvait faire craquer les verrous de la raison, et il pourrait devenir dangereux...Ou juste mourir. Son âme était pure, il suffirait que quelque chose s'approche et la mange...L'aider était non seulement un moyen de rendre service, de découvrir des choses qu'il recherchait depuis longtemps, mais en plus de faire son devoir d'étudiant de Shibusen, c'était donc faire d'une pierre trois coups, un win-win-win situation !

Chaleureux, Adonis l'aida à se relever, avant de tapoter son épaule, commençant à sortir de la ruelle pour se diriger vers chez lui. Le sol était bien trop sale ici pour qu'on puisse manger et parler tranquillement...Si un rat venait à fouiner dans sa nourriture, le manieur ferait un carnage ! On plaisantait pas avec la bouffe, bon sang ! Surtout une aussi bonne...N'est-ce pas ? Enfin bon, on allait pas s'étaler là-dessus. Avec un accent qu'Adonis voyait comme allemand (c'était pas vraiment un pro de la langue, pas celle là en tout cas). En entendant son soi-disant nom, il se mit à rire à gorge déployée, tapotant dans le dos de son "informateur", n'y croyant pas une seule seconde.

-Hey bien, Jules, elle est bien bonne celle-là, surtout avec cet accent ! Tu restes comique, même si tu vis dans la rue, j'aime cet esprit ! Mais vraiment, c'est quoi, ton nom de famille ?

-Moi je m'appelle Jules Toutencarrrton. Enchanté moi aussi.

A l'entente de ce nom, Adonis ne put s'empêcher de rire. A vrai dire, il n'avait pas vraiment essayé non plus. Toutencarton, lui, n'avait pas compris la blague. Débutant dans la langue, il pensait avoir dut faire une bourde monumentale.

-Hey bien, Jules, elle est bien bonne celle-là, surtout avec cet accent ! Tu restes comique, même si tu vis dans la rue, j'aime cet esprit ! Mais vraiment, c'est quoi, ton nom de famille ?

Hein ? Comment ça "Mais vraiment c'est quoi ton nom de famille ?" Bah, son nom c'était Toutencarton, et ça l'avait toujours été. Le clochard ne voyait pas ce que ce nom avait de risible. En Russie on ne s'était jamais moqué de lui, c'était un nom de famille comme les autres. Mais peut-être qu'en anglais il signifiait quelque chose... Peut-être que "Toutencarton" avait un rapport ridicule avec leur histoire... Ou peut-être que ça voulait dire quelque chose... "Touten carton",non ça veut rien dire... "Tout en car ton" ? Oui c'est ça ! "Tout en carton" !
Mais il ne trouvait pas ça drôle. Il trouvait même cela immature de se moquer. Bien sûr, Toutencarton pensait cela car c'était on se moquait de lui. Mais si ce nom était porté par quelqu'un d'autre, il n'aurait pas pu retenir au moins un petit rictus moqueur...
Le Yôkaï marchait à côté d'Adonis dans la rue. Toutencarton, timide, ne disait rien et réfléchissait à la "blague" sur son appellation. Et de toute façon, cette conversation ne mènerait nulle part : l'homme au cheveux argentés ne croyait pas une seconde au fait que quelqu'un puisse s'appeler Toutencarton et Toutencarton, lui n'avait aucune preuve de l'authenticité de son nom. Enfin, ce dernier prit la parole :

-Non, vrraiment, mon nom est Toutencarrton. Et la blague est pas drôle.

[Ps : Désolé, j'avais zappé que t'avais répondu ]

Il était vrai que rire à la présentation de quelqu'un n'était pas très...Réglo, et pas réellement démonstratif d'une maturité exceptionnelle. Il faut dire que le jeune homme avait pris ça pour une blague, rigoler était donc un réflexe tout à fait naturel, n'est-ce pas ? Et puis bon, c'était un clochard, il l'avait regardé en souriant, il avait à manger, il devait être heureux...une petite blagounette pour montrer sa reconnaissance, c'était quand même pas LA chose la plus incroyable qu'il avait pu tenter...Pour sa défense, Adonis aurait pu dire qu'il l'avait fait pour ne pas le vexer et lui remonter le moral...mais en fait, le manieur avait toujours eu une faiblesse pour les accents, qu'il trouvait la plupart du temps tout simplement pliant. Le "Toutencarton" n'avait rien arrangé, surtout avec cette façon de rouler les r. Et puis, il y avait le fait qu'il était sans domicile fixe, et que son nom faisait référence aux cartons...si ça c'était pas un jeu de mots énorme, fallait redonner des cours d'humour au petit Adonis ! (Et croyez moi, il le faudrait vraiment). Devant son nouvel "ami" timide, qui prenait visiblement le temps de tâter le terrain pour voir si il n'avait pas dit de bêtise, le garçon continuait de marcher, arrivant chez lui, vraiment, il habitait tout près.

Il ouvra la porte et retira ses chaussures avant d'entrer, invitant Jules à rentrer. Au moment où il le regarda, l'autre semblait avoir repris un air sérieux, il avait compris la blague. Bon, ça lui avait pas trop plu, visiblement. Désolé (et il venait de comprendre son manque de délicatesse, à vrai dire), il se gratta l'arrière de la tête, gêné.

-Désolé, Jules, mais hey ! Tu es sans-abri, tu t'appelles ToutenCARTON, et puis cet accent mon gars...Enfin, j'ai toujours eu le rire facile aussi. Moi je m'appelle bien "Bois Rouge", hein, c'était pas fin de se moquer, c'est vrai.

Après ça, il laissa la porte ouverte, tapotant l'épaule du clochard en signe d'excuses, avant de se diriger vers la cuisine. il mit la boisson dans le frigo, avant de disposer la nourriture sur la table. Il passa ensuite sa tête par la portière de la salle à manger, regardant son étrange invité, qui devait être surpris, certainement...ça ne devait pas être tout les jours qu'un inconnu l'invitait chez lui. D'autant que la maison était grande...Environ quatre grandes chambres, un étage, une salle à manger en haut et en bas, une salle juste pour la muscu, un billard...vraiment, il avait une maison spacieuse et bien meublée. Il avait vendu celle de ses parents, dans son petit village paumé, et croyez-le ou non, il avait eu une jolie somme ! Un petit riche qui cherchait une retraite retirée dans la campagne...et il n'y avait pas plus paumé que le village natal d'Adonis, alors c'était impec'. L'air de rien, il le dévisagea, avant de le détailler de haut en bas.

-Mon gars...Va te laver, par contre, t'as bien besoin d'un bain, ça va te faire du bien. Défoule-toi sur l'eau chaude, il fait frisquet, dehors. Et si tu veux, y'a des habits propres, sur la table à repasser...si ils te vont, c'est cadeau, on dirait que t'as fait la guerre avec tes fringues...sans vouloir t'offenser. Tu montes les escaliers, et c'est au bout du couloir.

Il repassa sa tête côté salle à manger, allant s'assoir à table, se servant un verre de saké. Le seul inconvénient, c'était que la boisson qu'il avait achetée à la boutique n'était pas fraiche, donc bon...l'avalant d'une traite, il s'en servit un autre, attendant l'inconnu avant de manger. Pour son âge, boire n'était pas forcément une bonne chose, mais il tenait incroyablement bien l'alcool, peut-être grâce à sa longueur d'onde, qui faisait le ménage (ou pas, c'est une hypothèse qu'il s'était imaginée, comme ça). Les pieds sur la table, la chaise légèrement renversée en arrière, il attendait, un sourire aux lèvres.

-J'espère qu'il va pouvoir me renseigner...

En effet, Adonis habitait vraiment à deux pas. Ils n'étaient partis de la ruelle où le clochard s'apprêtait à passer sa nuit que depuis quelques minutes. Ou alors, l'enthousiasme de ce dernier à l'idée de ne pas passer la soirée seul, l'avait trompé sur la durée du voyage. Cette maison ce trouvait dans une rue bien plus fréquentable que celle ou l'homme au cheveux argentés avait trouvé Toutencarton. Mais ce dernier ne supportait pas l'attitude de la population envers les sans-abris.

En arrivant chez lui, Adonis ôta ses chaussures, Toutencarton fit de même, par politesse, pourtant gêné de devoir exposer l'état de ses chaussettes. L'homme au cheveux argentés se gratta derrière la tête, visiblement gêné lui aussi et dit :

-Désolé, Jules, mais hey ! Tu es sans-abri, tu t'appelles ToutenCARTON, et puis cet accent mon gars...Enfin, j'ai toujours eu le rire facile aussi. Moi je m'appelle bien "Bois Rouge", hein, c'était pas fin de se moquer, c'est vrai.

C'est vrai que le nom d'Adonis n'était pas irréprochable non-plus. Et la "blague" aurait été vraiment plus drôle si il avait dormi abrité sous un carton. Adonis tapota l'épaule du sans-abri puis alla préparer le dîner. Toutencarton, lui, ne savait pas trop quoi faire. Timide comme il est, il aurait pu rester une bonne demi-heure à l'entrée si on ne l'avait pas invité. Il ferma la porte et observa ce qu'il pouvait voir de l'intérieur de la maison de là où il se trouvait.

-Mon gars...Va te laver, par contre, t'as bien besoin d'un bain, ça va te faire du bien. Défoule-toi sur l'eau chaude, il fait frisquet, dehors. Et si tu veux, y'a des habits propres, sur la table à repasser...si ils te vont, c'est cadeau, on dirait que t'as fait la guerre avec tes fringues...sans vouloir t'offenser. Tu montes les escaliers, et c'est au bout du couloir.

La douche était une bonne idée. En effet, Toutencarton pouvait être traçable à l'odeur sur plusieurs mettres. Et Adonis lui avait dit qu'il pourrait "se débarrasser de cette couche de crasse qui te poursuit depuis des mois". C'était dit de façon pas très sympa, mais l'intention était bonne. Le sans-abri esquissa un sourire et dit, toujours avec l'accent:

-Ah oui. Merrci beaucoup

Il se dirigea donc vers la salle de bain. Beaucoup de portes étaient fermés. Ce qui donnait à la maison un aspect gigantesque. Dans le couloir, il y avait environ cinq portes. Par les quelques unes entrouvertes, Toutencarton aperçu quelques chambres et une salle à manger. Ce dernier était tombé sur une perle rare des riches. D'habitude ils n'aident jamais directement leur prochain. Ils se contentent d'envoyer un chèque à quatre chiffres à une association caritative dont ils ne connaissent à peine le nom et voila. Mais Adonis, lui, aidait vraiment son prochain.
Le crasseux arriva au bout du couloir et ouvrit une porte. Elle donnait sur la salle de bain. Il alluma la lumière, ferma la porte à clef et sortit une serviette d'un placard ouvert au hasard. Celle-ci était noire, car c'est toujours moins visible de tacher une serviette noire. Il la posa sur le rebord du lavabo. Ensuite, il se déshabilla et prit une douche tiède. Il n'avait jamais eut l'habitude de l'eau chaude. Apres s'être intégralement lavé en utilisant le moins de savon possible (Toutencarton à horreur d'avoir l'impression d'exploiter les gens. Il le fit une fois et regretta amèrement.), il sortit de la baignoire et se sécha. Ensuite, il sortit des affaires propres de son sac - il n'avait pas l'intention d'utiliser ceux mis à dispositions par Adonis - et s'habilla. Il avait mit un jean propre et un tee-shirt bleu clair. Il sortit aussi une brosse à dent. Il utilisa un peu du dentifrice d'Adonis aussi.
Ensuite, il rangea tout, mit sa serviette à sécher et redescendit. Adonis était assit, souriant, les pieds sur la table, devant une bouteille de saké. Il semblait déjà en avoir bu. Toutencarton arriva dans la salle à manger, aligna un timide "Je peux m'asseoirr ? Oui ? Bon..." puis s'assit timidement. Ensuite, il prit vraiment la parole.

-Encorre une fois, merrci beaucoup, c'est trrès gentil de votrre part.

Toutencarton esquissa un sourire en coin. Son anglais était très poli, presque ridicule. Il utilisait le langage que l'on apprend à l'école : "Merci beaucoup", "Où êtes vous" etc...
Ce dernier attendait la réponse d'Adonis. Ce n'était pas trop le genre du Yôkaï d'engager les conversations.